

« Je suis fier. Fier de voir que nos pèlerins, pour qui la gestion du quotidien est parfois si difficile, s’enthousiasment pour ce voyage sans montrer de crainte excessive. Et fier que l’Eglise catholique propose ce défi ». La voix de Bo Heide-Jochimsen, le directeur de l’association danoise Projekt Udenfor (« Projet Dehors ») vibre à l’autre bout du fil. Dans cette petite association qui a maintenant une vingtaine d’années, on maraude dans les rues de Copenhague afin d’aller à la rencontre des personnes de la rue. Premier étonnement, quand on s’enquiert du profil des pèlerins : sur le convoi de 8 personnes, outre les deux travailleurs sociaux de l’association, on compte cinq Polonais et un Russo-Danois. Une particularité du fameux système de « flexi-sécurité » local fait en effet que les ressortissants nationaux bénéficient d’une solidarité d’Etat très active ; en revanche, les immigrés venus de l’Union européenne n’ont droit à rien, et l’accès au monde du travail est quasi-impossible si on n’a pas un contrat signé avant d’entrer dans le royaume. « C’est un pays génial si vous êtes Danois, explique Bo. Si vous ne l’êtes pas, seules les Eglises et quelques organisations non-gouvernementales se préoccupent de vous. »
Bo et ses collègues s’attachent donc à rechercher ces « pauvres entre les pauvres », à nouer des liens avec eux, à les aider à se stabiliser. Le prochain projet de leur association est porteur d’une démarche que l’on retrouve beaucoup dans les différentes associations qui constituent Fratello : faire en sorte que les personnes prennent elles-mêmes leur destin en main. « Nous ouvrons un chantier de deux ans pendant lequel les personnes que nous aidons construiront avec nous leur propre maison. » La dimension affective et de projection est en effet essentielle pour beaucoup : « Ils ne sont pas tant « sans domicile fixe » que « sans foyer », sourit Bo, jouant en anglais sur les mots house et home.
C’est en avion que les 8 pèlerins se rendront à Rome mi-novembre. Pour certains, c’est la première fois qu’ils utiliseront ce moyen de transport. « L’un d’eux redoute plus l’avion que de rencontrer le pape ! C’est dire si François a touché juste avec cette initiative. »